Bande dessinée

Dom Juan de Molière prend un Ricard

Pas très fin mon jeu de mots, mais tant pis!
S’il est une oeuvre incontournable dans toute l’histoire de la littérature française, c’est bien
Dom Juan de Molière… Lue et relue au lycée, à la fac (pour les lettreux)…
ou pour le plaisir tout simplement. Vue et revue aussi sur scène. Car
Dom Juan fait partie de ces oeuvres que l’on découvre, littéralement, à chaque lecture ou à chaque mise en scène. Et si l’on n’adhère pas au contenu, on ne peut pas ne pas lui reconnaître toutes les qualités qui l’habitent.
Bref, tout ça pour dire que lorsque Babelio a lancé son opération Masse Critique de janvier, j’ai saisi l’occasion de redécouvrir cette oeuvre… en BD!
Merci à Guillaume, à Babelio et aux éditions
Delcourt
!

dom-juan.jpgDom Juan de Molière

Scénario: Sylvain Ricard & Myrto Reiss

Dessin: Benjamin Bachelier

Couleur: Hubert
Ed. Delcourt, Coll. Ex-Libris
2010

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Résumé

Dom Juan, véritable libertin d’esprit et de moeurs, parcourt les routes aux côtés de son fidèle serviteur, Sganarelle. Alors qu’il a épousé Done Elvire, le séducteur s’amourache
d’une autre.
D’aventures en mésaventures, Dom Juan va apprendre que son libertinage n’est pas (encore) admis…

Avis

Une adaptation impose toujours, nécessairement, des contraintes. Contraintes liées au genre le plus souvent… Ainsi, adapter une oeuvre théâtrale en bande dessinée demandait de « raconter » une pièce en une soixantaine de pages et en « cases », autrement dit, des choix et des coupes s’avèrent indispensables. Mais si on l’accepte, alors les Classiques deviennent accessibles à tous, par l’oeuvre originelle, par la mise en scène ou par les images. Au choix! Tout cela est d’ailleurs expliqué très clairement dans la Préface.
Revenons à notre BD… Les auteurs offrent une lecture réussie de l’oeuvre de Molière: les personnages « vivent » et portent l’esprit de la pièce, même si l’intrigue est transposée au XXe siècle. Les auteurs ont par ailleurs eu soin de conserver la langue de Molière si bien que la modernisation n’entâche pas la fidélité à l’oeuvre originelle. Cette volonté de faire voyager les personnages dans le temps est un choix revendiqué par les auteurs: le Classique de Molière n’a rien de désuet; au contraire, il « résonne » toujours… C’est ainsi que la BD met en avant les thèmes chers à Dom Juan: la religion, la charité, l’altruisme, la fidélité, etc. Faire des choix, les assumer… A noter que la Nature occupe ici une place importante, comme si elle exerçait (d’une certaine façon) un pouvoir sur l’Homme… Inutile de disserter sur l’oeuvre, elle est déjà bien rodée!
Quant au dessin, il se veut simple, souple, presque minimaliste, de sorte que les personnages sont parfaitement mis en valeur et se détachent du décor (à l’instar d’une mise en
scène). Le trait varie, grossit, s’accentue et se noircit selon les expressions et gestes des personnages. Ainsi, Dom Juan est tour à tour doux, léger (un peu) ou manipulateur, stratège et diabolique. Enfin, les couleurs créent un effet « craies grasses » très joli, à l’ancienne tout en étant moderne. En fait, le style de Bachelier me fait penser à celui de Sfar ou de Trondheim…

En bref, ceux qui ont déjà lu l’oeuvre auront plaisir à découvrir cette nouvelle « version ». Quant à ceux qui ne l’ont jamais lue, ils en découvriront une interprétation fidèle.

Trois bonnes raisons de lire Dom Juan de Molière:
– Une adaptation réussie par l’alliance d’un metteur en scène et d’un scénariste BD. Interprétation qui retranscrit fidèlement l’esprit du Libertinage (les idées et
les moeurs).
– Un personnage mythique, ample, à (re)découvrir et à connaître, des personnages secondaires non moins importants et non moins complexes…
– Dom Juan ou comment lire 5 fois un texte sans jamais avoir l’impression de le « relire ». Chaque lecture apportant un nouvel éclairage, révélant un nouveau secret…

La collection Ex-Libris, dirigée par Morvan, propose de nombreux titres. J’imagine que ces derniers intéresseront les professeurs… Travail de l’image, lecture plus facile pour les « petits lecteurs », etc.

Lecture commune avec Anneso (ouf, je suis encore dans les temps).

Quelques aperçus (planches 1, 3 et 4):

dom juan 02dom juan 03

masse critique

14 commentaires sur “Dom Juan de Molière prend un Ricard

  1. ravie de voir que tu as apprécié aussi cette lecture commune. j’espere qu’on s’en organisera d’autres bientôt. bises !

  2. Je dois être une vieille conservatrice complètement rétrograde, mais j’aime trop cette pièce, dont je connais encore des passages par coeur, dont la fameuse tirade) pour me risquer dans cette
    adaptation…

  3. Pareil pour moi, je découvre l’existence de cette BD… ça me fait tout drôle quand même, de voir Molière adapté sous cette forme. Mais bon, why not ?

  4. C’est vrai que ça peut être utile pour aider nos jeunes lecteurs réticents à entrer dans un classique.
    Sinon, rien à voir, mais je fonds complètement sur la vidéo de ton blog it, qu’est-ce qu’ils sont chou!

  5. Tous les moyens sont bons pour faire aimer la Littérature : entrouvrir une porte merveilleuse sur l’autre et sur soi ! J’ai l’impression que c’est le cas avec cette bd !Il fallait oser et il a
    osé…

  6. Je le note… dans mon micro carnet d’expo, mon carnet de lecture est resté à Poitiers! Bon dimanche! J’espère finir la princesse de Clèves dans le TGV de retour demain soir!

  7. Je suis bien d’accord avec toi. J’ai trouvé il y a quelques années L’Avare en bd. Je l’ai acheté par curiosité. J’ai fait des études en théâtre, alors je ne trouvais pas cela être une bonne idée de
    faire d’un classique une bd. Mais finalement le concept m’a bien plu. Ca donne une autre dimension de l’oeuvre. Et j’ai vu qu’il y en a de plus en plus qui sortent, entre autre Roméo et Juliette de
    Shakespeare.

  8. J’ai lu également cette BD: la critique en arrive très vite sur mon blog! Comme j’ai vu que Anneso et toi l’aviez lu, je vais mettre un lien vers vos critiques. J’ai beaucoup aimé en tout cas, et
    ta critique est de qualité, bravo!

  9. Cette collection ex-libris a très bonne réputation. Il y a quelques années, les rares adaptations étaient souvent un peu pourries. Je dois dire que le dessin est intéressant. ça ne ressemble pas
    tout à fait à du Sfar mais je comprends ce qui t’y a fait penser (sans pouvoir l’expliquer en mot !). De mon côté, je viens de lire l’adaptation du Montespan de Teulé (Tjs chez Delcourt mais dans
    une autre collection.) Impression mitigée… Intéressante si on n’a pas lu le roman en fait.

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